jeudi 3 juillet 2008

Un Brésil fait de brésils

Des Brésils en un seul: Gal Costa, Daniela Mercury, Gilberto Gil,
Jorge Mautner, Lenine, Seu Jorge, Jorge Benjor et ...Henry Salvador.

Ainsi 2009 est décrétée année de la France au Brésil. Projets sociaux et commerciaux mais aussi échanges culturels rendront la politesse à ceux qui avaient fait de 2005, l’année du Brésil en France. Et ceci de bien belle manière. (Si la curiosité vous taraude, tapez sur votre clavier les mots-clefs pour en savoir un peu plus sur les évènements prévus à partir du mois d’avril prochain).

Pour rester dans le domaine musical de ce blog, la venue de nombreux artistes brésiliens en terre française avait été superbement organisée. Mais la cerise sur le gâteau ‘vert et jaune’ avait été ce grand concert, immortalisé sur dvd, qui tint lieu le 13 juillet, Place de la Bastille, à Paris. L’affiche de ce show avait été savamment et stratégiquement structurée. Les artistes avaient non seulement été choisis pour leurs importances dans la musique brésilienne, mais aussi en fonction de leur potentiel énergique et festif. Mais le public savait-il réellement à qui il avait à faire ? Voyons cela de plus près…

Le Brésil métissé de Rio et Bahia: Jorge Benjor et Gilberto Gil

La présence de Gilberto Gil ne souffrait d’aucune discussion. Déjà Ministre de la culture du gouvernement Lula, le bahianais s’était impliqué corps et âme dans ce projet dont il avait pris les rênes. Outre ce fait, Gil a toujours été le musicien le plus populaire dans les pays francophones d’Europe. Présent dans nos festivals quasi annuellement, il représente ce Brésil métissé et festif -mais aussi social et ésotérique- qui a toujours ratissé un public bien plus large que les amateurs des musiques du Brésil. Son sens de la communication ainsi que ses prestations, l’ont davantage imposé chez nous que ses tubes radiophoniques. De mémoire, le très ‘Earth, Wind & Fire’ « Palco », « Todas meninas bahianas » ou le baiao « Eu so quero um xodo » n’ont connu en France qu’un succès d’estime. D’autres de ses titres furent adaptés en français avec des fortunes diverses. On retiendra néanmoins le superbe « Brésilien » (« Viramundo ») chanté par le grand Claude Nougaro.
Pour le côté informatif, sachez que Gil sort d’une longue période de non-productivité musicale -suite à sa charge ministérielle- et vient de lancer un nouvel album, «Banda larga cordel », onze ans après « Quanta »(1997) son réel dernier disque d’inédits. Les critiques à son encontre paressent cependant assez tièdes.

Todas Meninas Bahianas: Daniela Mercury et Gal Costa


Autre institution du Tropicalisme (ce mouvement musical né en 1967), Gal Costa fut aussi justement conviée à la fête du 13 juillet 2005. Plus glamour que sa grande complice Maria Bethania, elle convenait parfaitement pour ce grand événement populaire. Si Gal est -et restera- une des grandes chanteuses brésiliennes, ses albums, contrairement à Bethania, ont depuis longtemps cessé d’enflammer le public. Mais une autre bahianaise allait mettre le feu à Paris ce jour-là…

Depuis 1995, Daniela Mercury, a établi sa notoriété chez nous à travers nos grands festivals de ‘musiques du monde’(aie !). Sa musique ‘axé’ (‘énergie’ dans le langage afro-brésilien du Candomblé) construite sur les rythmes endiablés de Salvador de Bahia, ainsi que ses chorégraphies ‘aérobics’, ont toujours enchanté les publics du monde entier. Daniela continue toujours chez nous à cultiver cette image festive et exotique, mais sa carrière est quelque peu différente au Brésil. La belle s’est tournée vers un répertoire pop plus sophistiqué et d’excellente qualité avec l’inévitable conséquence de ne plus représenter commercialement une valeur sûre. Le jeune public brésilien lui a préféré depuis longtemps une autre reine du ‘samba reggae’ sautillant, Ivete Sangalo, ‘recordwoman’ des ventes toutes catégories.
En plus de ces stars bahianaises, on comptait aussi sur un autre incontournable pour ce méga concert : le carioca Jorge Benjor. La carrière de celui que l’on a longtemps connu sous le nom de Jorge Ben, a connu un chemin particulier. Véritable fondateur du Samba rock, son importance est indiscutable quand il s’agit d’évoquer l’histoire de la MPB. L’artiste qui explosa dès 1963 avec le tube planétaire «Mais que nada », allait jusqu’en 1976 imposer ses riffs de guitares funk et influencer bon nombre de musiciens et de groupes jusqu’à aujourd’hui. Tous les albums de cette période sont irrésistibles et même novateurs sur la scène mondiale. Depuis, ses coups d’éclat furent pratiquement inexistants si l’on excepte les albums « A Banda do Zé Pretinho » (1978), « Jorge Benjor » (1989), et « 23 » (1993), trois étincelles dans une production terne de plus de trente ans. Au Brésil, seuls ses anciens albums se vendent encore raisonnablement, et les reprises de ses classiques d’antan interprétés par d’autres artistes sont innombrables. Ses concerts rassemblent toujours les foules qui dansent encore et toujours sur ses éternels classiques que sont « Taj mahal », « Fio maravilha » et « Pais Tropical ». Le respect qu’il rencontre s’étend à tous les styles et toutes les générations.
Les deux autres grands noms présents à cet évènement parisien de la Place de la Bastille, avait depuis un certain temps recueilli une certaine renommée en France. Un succès un peu ‘hype’, dirais-je même…

Rio et le Pernambuco : Seu Jorge et Lenine

Lenine fut l’un des principaux acteurs de la rénovation de la MPB dans les années 90 (voir les 2 posts 30 avril ). Une rénovation venue du ‘Nordeste’ comme ce fut souvent le cas durant les décennies précédentes. Luiz Gonzagua et Jackson do Pandeiro (années 40 et 50) ; Sergio Ricardo, Edu Lobo ou Geraldo Vandré entre la Bossa et le Tropicalisme des années 60 ; ou Alceu Valença, Zé Ramalho, Geraldo Azevedo et Fagner dans les 70’s. Seule la période des années 80 laissa place à la grande vague du rock national venue de Brasilia et de Rio principalement.
Lenine -avec Zeca Baleiro, Chico César et Chico Science- allait réaffirmer la grande richesse musicale des états du nord du Brésil. Depuis l’album « Na Pressao » (1999), le ‘lion du Nord’ fut très sollicité en France où il enregistra l’excellent album ‘live’ « Incité » (2004), à la Cité de la Musique de Paris. C’est à lui que revint l’honneur d’attaquer le concert du 13 juillet avec le puissant ‘Sob o mesmo céu (Brasil Brasis)’ qu’il composa pour l’occasion. Un hymne fort au Brésil confluent de toutes les influences, et un début de show sans concession, chargé d’énergie brute à couper le souffle.
Au Brésil, Lenine est devenu une institution de la MPB, et tant ses compositions et ses talents de producteurs sont âprement disputés. On attend d'ailleurs impatiemment son prochain album "Labiata" pour septembre.
Enfin, les organisateurs avaient misé sur un artiste que la France venait de découvrir d’une manière bien étrange : Seu Jorge.
Le label français Favela Chic venait à peine de lancer cette année sur le marché français le surestimé album « Cru », un disque mineur conçu pour le marché européen, de ce carioca issu des favelas, un artiste à la voix de crooner incomparable et au swing dévastateur. Les brésiliens se demandent toujours aujourd’hui par quel mystère « Cru » a pu séduire notre public et faire connaître l’auteur d’albums bien plus représentatif de son talent. Etait-ce sa bonne prestation en tant qu’acteur dans le film « Cidade de deus » (2002) de Fernando Meirelles , ou un excès de parisianisme… ? Toujours est- il que, avec Lenine, il représentait un des aspects de la musique brésilienne comptemporaine.
Il serait injuste d’omettre la présence à cet événement de Jorge Mautner, davantage poète et écrivain que compositeur et musicien, un personnage singulier et satellite de la musique brésilienne. Et puis bien sûr, le maître de cérémonie, Henri Salvador, tout auréolé d’un ‘Jardin d’hivers’, certes un peu décalé avec l’été ambiant de Paris. Sa prestation ne fut pas très heureuse ni adaptée pour un tel concert de masse.

Épilogue : Contrairement à ce qu’on peut craindre quand il y a pléthore de stars, ce concert fut une superbe réussite, et le dvd transpire toute l’énergie et la joie partagée par les dizaines de milliers de spectateurs. Une fête honorée par la présence du Président de la république du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, secondé par le Maire de Paris, Bertrand Delanoé. Il nous reste à espérer que la France puisse rendre la pareille à ce concert de haute tenue en 2009, et que le Brésil puisse recevoir leur hôte comme il le fut en cette année 2005. N’en doutons pas…



"SOB O MESMO CEU (BRASIL BRASIS)" -LENINE, accompagné de Ana Carolina,Fafa de Belem, Sandy, Vanessa da Mata, Elba Ramalho, Margareth Menezes, Fernanda Abreu et Alcione.

14 commentaires:

Anonyme a dit…

Olá, Daniel! Adorei o vídeo. Tenho uma simpatia muito grande pelo Lenine. Gosto quando essas estrelas da MPB se encontram. Costuma dar certo. Bjs.

Daniel Achedjian a dit…

Oi Jane, pois é, Lenine foi um dos meus primreiros "choques" musicais nos anos 90. Nao achei a versao do show em frança do Brasil Brasis, que era melhor, mas essa, apesar do som é interessante. Veja que a vozerao da Ana Carolina esta apagado por causa do microfone (<: ! Beijos...

Anonyme a dit…

Superbe texte Daniel, cela me donne envie d'en connaître davantage!!

Anonyme a dit…

Ola Daniel!
Je te félicite pour cet article, il est vraiment très instructif.
J'ai pensé qu'il serait intéressant de mettre la traduction de la chanson "Sao Gonça". Je trouve que comprendre les paroles cela aide à mieux apprécier la chanson. Ah c'est une traduction "Maison" donc n'hésites pas à corriger s'il y a une expression typiquement brésilienne qui ne correspond pas...mais tu n'auras pas à le faire :-):-)

Claudia B.

Sao Gonça

Pretinha (Ma petite métisse)
Je fais tout pour notre amour
Je fais tout pour le bien de notre bien (mon bébé)
La nostalgie est ma douleur
Qui dévaste encore mon coeur
Ne doute pas qu'un jour
Je te donnerai le ciel
Mon amour joint à une alliance
Pour que l'on puisse se marier
A la mairie ou à l'église
Si tu le veux bien
Si tu le ne veux pas, c'est bien aussi (mon bébé)
Mais essaye de comprendre
Habiter à Sain Gonçalo tu sais bien comment c’est
Aujourd'hui l'après-midi le pont était embouteillé
Et je suis allé à pied
J'ai essayé de t’appeler
L'"orelhão" (cabine publique)de ma rue était foutu
Et mon crédit était à zéro
Mais tu me crois si tu le veux…

Anonyme a dit…

Meu amigo!
me desculpe por ter sumido...mas tenho ficado extremamente enrolado com o trabalho!
Gostaria de saber se vc recebeu, ou comprou, a BRAVO! de maio....pois a edição é especial sobre as 100 principais canções da MPB de todos os tempos...
Se ainda não viu, me mande seu endereço por emai que te enviarei...
Abração!

Anonyme a dit…

Caramba...esqueci de assinar! Esse comentário aí da BRAVO! é meu...

Daniel Achedjian a dit…

Merci Hubert, c'est en effet l'objectif n°1 de ce blog: donner envie, et éveiller la curiosité. La route est longue, mais je suis encore tellement jeune! hum, hum...au plaisir de te revoir ici!

Daniel Achedjian a dit…

Excellente traduction Claudia B.! Tu as du trouver "um brasileiro que é belga" ou vice versa (:. Ceci dit cela me donne l'idée de traduire des chansons marquantes de la MPB en tant que post. Mais comme tu le dis, il est ardu de traduire certaines expression, sans perdre les nuances et les sentiments évoqués par l'auteur...beijos

Daniel Achedjian a dit…

Ola Calzao anonimo (rsrs)!! Grande prazer de te rever aqui! Essa revista nao tenho, mas estou curioso de lê-lo. Vou te enviar meu mail no seu pessoal, até ja...

Anonyme a dit…

soul

Anonyme a dit…

Fiquei muito feliz por descobrir este interessante blog sobre MPB, criado e alimentado por um "guerreiro" belga (num célebre poema Victor Hugo fala da tradicional combatividade belga que derrotou as tropas de Calígula). Na verdade, para além da música brasileira, uma paixão, sempre me interessei pela música de expressão francesa e em muitas noites de poesia entre amigos ouviamos os belos poemas e músicas de Brel, Greco, Ferré, Solevile, Catherine Ribeiro, Barbara, Moustaki... que pena a canção de expressão francesa não chegar mais até nós portugueses. Por vezes procuro e lá encontro: por exemplo Matieu Rosazs apaixona-me, as suas canções melancólicas e as novas leituras das interpretações de Barbara.
Para terminar saliento dois belos encontros que a cantora Maria Bethania (que como Chico Buarque está mais virada para a Europa do que para os Estados Unidos) fez com as actrizes Agnes Jaoui (no disco Canta) e com Jeanne Moreau (no Poema dos Olhos da Amada). Essa última actriz também tem uma interpretação delirantes de Joana, a francesa de Buarque.
Abraços e parabéns para si Daniel
Zeff

Anonyme a dit…

Ok, Daniel!
Me mande o endereço, mas de qualquer maneira vamos ter que esperar um pouco...os correios brasileiros estão em greve há 30 dias!
A revista é maravilhosa! E adivinha qual a canção ficou em primeiro lugar na opinião dos críticos especializados?

Daniel Achedjian a dit…

Caro Zeff, vocé parece ser um verdadairo francofilo. Tambem tenho uma grande paixao par alguns dos compositores que vocé citou cujo Brel e a grande Barbara. E para mim, o George Moustaki, foi o maior ponto de ligaçao entre a musica de lingua francés e o Brasil. Bem mais do que o Henri Salvador, nao tem comparaçao.Obrigado em nome do meu "povo", o mais valente "de la Gaule", como escrevia o "imperator", Julios César! Seja bem vindo aqui, e nao hesite em deixar comentarios pertinente! Obrigado.

tess a dit…

Bonjour,
J'adore depuis toujours la force et la violence de Maria Bethânia. Je voudrais bien la traduc de Viramundo....Je la cherche en vain sur le net. Je comprends un peu le portugais mais pas toute la chanson.
Merci

CE BLOG EST DÉDIÉ AUX CURIEUX QUI AIMERAIENT CONNAÎTRE L'ART ET LA MUSIQUE POPULAIRE BRÉSILIENNE. UNE OCCASION POUR LES FRANCOPHONES DE DÉCOUVRIR UN MONDE INCONNU OU IL EST DE MISE DE LAISSER SES PRÉJUGES AU VESTIAIRE.